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Titanic

On connaissait James Cameron pour ses films de science-fiction épiques qui, de Abyss à T2 en passant par Aliens, étaient parvenus a le distinguer au cœur de l'industrie hollywoodienne.

Loin de l'esprit idyllique d'un Spielberg, le style de Cameron est sombre, apocalyptique, exploitant les aspects les plus angoissants des univers futuristes : comment oublier les champs de batailles de T2, les vertigineux fonds marins d'Abyss ou les gargouilles extraterrestres d'Aliens.

Dans ces mondes dominés par des forces mécaniques maléfiques et écrasantes, les individus sont des survivants luttant pour préserver leur humanité. Sarah Connor dans T2, risquait à tout moment de basculer de l'autre côte et de devenir aussi froide, insensible et robotisée que le Terminator.

James Cameron Titanic

Avec Titanic, pour la première fois, Cameron retrace un événement réel, une catastrophe qui a véritablement marqué notre civilisation. Pour le cinéaste l'enjeu que constitue Titanic est donc multiple, puisqu'il représente a la fois, un défi historique, humain et cinématographique.

Si le film se déroule au début du siècle et accorde une place prépondérante a la romance, il est cependant à 20.000 lieux de l'univers doucereux des adaptations d'Henry James ou Jane Austen.
Pour mettre en scène sa superproduction historique. Cameron n'est pas allé piller la réserve de costumes des productions Merchant-Ivory. Le goût du détail du cinéaste, son perfectionnisme, atteint ici des excès vertigineux. Si, dans ses films de science-fiction Cameron exploite des éléments tels que le feu, les métaux en fusion et l'éclat de l'acier, Titanic lui permet d'explorer d'autres matériaux.

Pour le premier voyage du fleuron de l'Angleterre edwardienne, idole titanesque érigée à la technologie, chaque accessoire se devait d'être neuf et rutilant. Aussi sûrement qu'il exacerbait la chaleur de la lave ou l'obscurité claustrophobe des fonds marins, Cameron, dans Titanic, avive la densité du bois, nous éblouit par la rutilance du cuivre et le brillant des vernis.

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A la vision des débauches de toilettes féminines sophistiquées, on mesure le travail colossal entrepris par la costumière Deborah L.Scott pour dépeindre la gentry du début du siècle dans Titanic. En effet, après la rigidité de l'époque victorienne, la femme anglaise connaît une période de libération. Les robes se font légères et plus colorées, et les aristocrates n'hésitent à en changer cinq fois par jour.

On notera le soin particulier accordé aux chapeaux des "ladies". Ces pièces montées lourdes et complexes, aux entrelacements de rubans, sont déjà un symbole de l'orgueil de cette civilisation. Pour cette société imbue de ses privilèges et de son pouvoir. le "bateau des rêves" va devenir le "bûcher des vanités".

Le Titanic est plus qu'un luxueux paquebot : une véritable ville flottante, avec ses palaces luxuriants, siège de l'élite, et ses quartiers pauvres où s'entassent les émigrés en partance pour les USA. La longueur de la première partie est nécessaire pour explorer ce labyrinthe socioculturel qu'illustrent a la perfection le dédale du navire. Nous arpentons les salles de réception et les suites impériales, descendons dans les cabarets recrées par les passagers les plus démunis, avant de nous enfoncer dans les profondeurs du navire et d'y découvrir l'immense salle des machines, véritable "ventre de la bête".

L'étalage inconsidéré des richesses a de tout temps été le signe de la décadence des empires et de l'imminence de leur chute. Cette thématique a été abondamment illustrée par le cinéma-catastrophe (La tour infernale, n'étant ainsi qu'une version contemporaine de l'histoire du Titanic), sans jamais atteindre cependant un tel degré d'intensité.

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Comment ne pas être indigné par la vision des secondes et troisièmes classes, bloqués par les membres de l'équipage, alors que l'aristocratie se ruait vers les canots ?

Titanic s'affirme avec audace comme un mélodrame. Le but du mélodrame n'étant pas, comme on serait trop souvent tenté de le croire, de mettre en scène une simple bluettes. II s'agit avant tout d'offrir au public la représentation la plus spectaculaire possible des sentiments.

Pour le cinéaste Cameron, la catastrophe et le désastre sont des facteurs prédominants pour insuffler aux personnages et à leurs émotions, un caractère d'exception. N'oublions pas que T2 racontait également les terribles retrouvailles entre un fils et sa mère. Avec Titanic, James Cameron se révèle comme le digne héritier de Douglas Sirk, le maître du mélodrame, lui aussi amoureux des bolides et de la vitesse.

Titanic raconte la rencontre de deux êtres : Jack Dawson, un artiste retournant en Amérique après un séjour en Europe, et Rose DeWitt Bukater, jeune fille de l'aristocratie voguant vers Philadelphie afin d'y conclure un riche mariage. Leur histoire d'amour, fulgurante, va aller contre les convention et briser les différences sociales. Leonardo DiCaprio (Mort ou vif, Roméo et Juliette) et Kate Winslet (Créatures célestes, Jude) forment un couple bouleversant d'enfants égarés.

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Cameron ne se contente pas d'exposer les sentiments par le biais des dialogues ou du scénario. Jusque dans ses images les plus épiques et spectaculaires, le réalisateur parvient à préserver une dimension intimiste. Depuis T2, Cameron utilise les services de Jim Muro, réalisateur de Street Trash et virtuose de la SteadyCam (on lui doit les vues subjectives de Strange Days de Kathryn Bigelow).

Le style énergique de Muro est aussi spécifique que celui d'un danseur : une grande souplesse visuelle sur laquelle souffle un frémissement qui scande l'image et lui impose son dynamisme. La caméra de Muro respire au rythme des personnages, entre en symbiose avec leurs mouvements, comme le démontre la course folle des amants à travers la salle des machines.

L'Homme imprime la griffe de son humanité, et rehausse ainsi la dimension spectaculaire du cinéma de James Cameron. Ainsi, un mouvement de caméra virtuose s'ébauche-t-il sur le visage de Leonardo DiCaprio avant de s'élever pour révéler l'immensité du pont sur lequel évoluent des silhouettes, à la manière d'un ballet méticuleusement réglé.

Le spectateur ne peut que se sentir impliqué et submergé face à ces décors grandioses, qui le dominent, menaçant de l'écraser ou de l'emporter vers des cimes insoupçonnées. En associant la passion et ses tourments à des images d'exception confinant au vertige, James Cameron renoue avec l'essence même du romantisme.

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"Titanic" explique le réalisateur, "n'est pas seulement un conte moral - un mythe, une parabole ou une métaphore sur les faiblesses de l'humanité. C'est aussi une histoire de courage, de sacrifice, et par dessus tout d'amour."

C'est grâce à ce romantisme effréné que Cameron parvient à nous entraîner dans une dimension fantastique.
Titanic relate un voyage dans le temps, la quête désespérée d'un amour perdu. Le film entier relate une histoire racontée par Rose, de nos jours, à l'équipe de scientifiques explorant l'épave du navire. Une situation par le truchement de laquelle Cameron nous offre une image magnifique : le visage de Rose, âgé, reflété par l'écran d'un téléviseur se superpose aux vues subjectives de la sonde évoluant dans les couloirs et les chambres immergées. Rose devient ainsi symboliquement, une âme errante, prisonnière du vaisseau-fantôme, ce palais ancré dans les fonds marins, rongé et blanchi par le sel. Ces plans du titan échoué, serviront de transition aux changements d'époque.

Grâce à de très subtils effets digitaux, le Titanic rutilant de 1912 se corrompt sous nos yeux, se couvre de mousse et de lichen, retournant à son état spectral d'épave engloutie. Ces images, parmi les plus terrifiantes et merveilleuses du film, lui confèrent une force onirique aussi impressionnante que le cauchemar nucléaire de T2.

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Le style vertigineux de James Cameron transforme le film en un voyage halluciné, tour à tour euphorisant et terrifiant.
Le portrait de Rose retrouvé dans l'épave devient une porte sur le passé. Rose revit son amour mais évolue dans un présent condamné, hanté par une catastrophe à venir. Le temps semble avoir emprisonné les deux amants dans l'un de ses cristaux. Fougueux et gracieux, Leonardo DiCaprio ne peut qu'évoquer Peter Pan, l'elfe à la jeunesse éternelle. Rose est une autre Wendy, abandonnant sa vie ordonnée pour suivre l'enfant sauvage et les aventures qu'il lui promet.

Kate Winslet, plus douce que les habituelles amazones du cinéaste, apporte son subtil mélange de sensibilité et de résolution à ce personnage qui choisit de se battre pour son amour. Les deux héros n'en finissent pas de voler au secours l'un de l'autre, de se soutenir sans fin au-dessus du vide ou au seuil de la mort.

Comme dans Peter Pan, l'amour restera à jamais figé dans la jeunesse. A l'Intérieur de la machinerie gigantesque, ce qui a survécu au temps est un simple dessin, une fragile preuve d'amour. N'ayant jamais recours à la force physique, le personnage interprété par DiCaprio témoigne du projet du cinéaste : faire exister l'humain au cœur d'une gigantesque machinerie hollywoodienne et historique. Comme dans l'élan d'une communion intime avec son protagoniste fier et rebelle, Cameron a lui-même exécuté les croquis du jeune peintre. Cette implication dans les plus infimes détails apporte une indispensable dimension personnelle au cinéma de ce cinéaste.

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Ce romantisme de chaque instant ne surprendra pas les fans du réalisateur qui gardent en mémoire la résurrection de Mary Elisabeth Mastrantonio dans Abyss, avant tout spectaculaire par son pouvoir d'émotion.

Plus surprenant est le parti pris esthétique adopté par Cameron. Là où l'on se serait attendu à de l'hyperréalisme, Cameron ose le factice, le merveilleux. Visuellement, Cameron multiplie les visions enchanteresses, paquebot fendant les flots précédé par un ballet de dauphins, voûte céleste scintillante, crépuscules rougeoyants en un flamboyant Technicolor.

Aux instants les plus dramatiques, les images se parent d'une douceur inattendue, les teintes des murs et de l'eau qui envahit les couloirs épousent celles des cheveux roux et des yeux verts de Kate Winslet, madone échappée d'une toile que Raphaël aurait transcendé.

Cameron est l'un des rares cinéastes contemporains à mériter le titre de visionnaire. A l'image des artistes du Moyen Age dépeignant l'Apocalypse ou comme les peintures mystiques de William Blake, le talent du cinéaste confine à l'apothéose par de saisissantes visions de chaos.

L'archaïsme des machines renforce encore la sensation d'un enfer mécanique tel que Chaplin le décrivait dans Les temps modernes ou Lang dans Metropolis. La salle des machines, ressemble à un organisme de métal avec ses rouages monstrueux et ses pistons gigantesques.

Le Titanic, symbole éphémère du triomphe de l'industrie, s'émaille alors d'une dimension mythologique. Les entrailles du navire abritent une fournaise, véritable forge de Vulcain travaillant pour les demi-dieux de l'aristocratie.

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Mais on ne peut concurrencer impunément les dieux : Poséidon, qui hantait les abysses, resurgit pour écraser les hommes sous le poids de leur vanité. A l'ultime instant du naufrage, une main divine semble littéralement briser le navire. Voir se dérouler sous nos yeux cet événement inimaginable, inspire une peur que l'on ne peut qualifier que de métaphysique.

Le film réserve également des moments de pur plaisir dévoués à l'action : plongée dans des couloirs submergés, scènes de cliffhangers, et même, péché mignon du cinéaste, un inattendu gunfight.

Ces péripéties sont centrées autour des personnages de Kate Winslet, Leonardo DiCaprio ou du "bad guy" Billy Zane. Cameron avec ce qu'il faut sans doute qualifier de pudeur, se refuse à transformer en simple spectacle les scènes de panique des passagers. Assurément par respect pour les véritables victimes de cette tragédie, Cameron ne retient de ces moments pathétiques de lutte pour la survie, que le chaos et la terreur.

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Nous verrons les privilégiés se battre et se piétiner pour une place dans un canot de sauvetage. Avec délicatesse, le cinéaste évoque le remords des survivants, dont certains seront rongés jusqu'à leur mort, par une culpabilité dévorante, ainsi que le souligne mélancoliquement Rose, quêtant une absolution qui ne viendra pas.

Pour évoquer l'agonie des ultimes naufragés, Cameron nous offre une des plus terrifiante et poignantes visions de ces dernières années : une mer des damnés, digne de Dante, sur laquelle, à perte de vue, flottent des bancs de cadavres livides. A la différence de Abyss (et si l'on excepte la partie contemporaine, proche du documentaire) nous ne nous aventurerons pas dans les profondeurs.

Cameron travaille la perspective de la ligne d'horizon, nous faisant ressentir la solitude des immensités glacées. Rien ne pourra venir au secours des naufragés, échoués au milieu de nulle part, quelque part dans le royaume des ombres. Indubitablement, James Cameron a signé avec Titanic l'un des films les plus impressionnant de toute l'Histoire du Cinéma, renouant avec la démesure d'un Cecil B. De Mille ou le faste des productions Zannuck. Mais le spectaculaire ne prend ici son sens qu'en passant par le regard hanté du cinéaste.

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Titanic est une œuvre d'art ambitieuse que la reconstitution historique ne fige jamais, traversée de moments de folie et d'images surréalistes. Alors que Cameron travaille déjà à la pointe des images de synthèse pour Avatar, plongeons dans l'une des aventures humaines les plus incroyables et émouvantes du siècle.

Stéphane du Mesnildot (L'Ecran Fantastique n°169).

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