1978 - Xenogenesis
Xenogenesis est très spécifiquement le genre de perles artistiques que tout fan rêve de voir un jour porté sur grand écran. C'est le type de matériaux qu'un réalisateur laisse derrière lui, inachevé et devenant donc forcément culte. C'est d'autant plus passionnant quand l'artiste est précurseur dans son domaine, cela forge un imaginaire remplis de subtiles frustrations et attise les passions.
L'existence même de Xenogenesis se révèle une mine d'informations d'une richesse inestimable pour tout pèlerin sur le chemin de la connaissance de James Cameron, surtout lorsque de l'aveu même du maître, ce projet serai à l'origine de sa présence dans le domaine du 7éme art.
A cette époque j'évoluai au sein d'un petit groupe de gens passionnés prêt à visionner tous les films de science fiction à l'affiche. Quand "Star Wars" est sorti, tout le monde voulais surfer sur cette vague, mais personne ne savais comment s'y prendre. Il y avais un groupe de dentistes qui cherchaient une niche fiscale et souhaitaient investir dans un film à petit budget. Un de mes amis était déjà sur le coup et commençai à leur vendre le truc, les baratiner sur des concepts en tout genre. Et puis finalement il m'a appelé pour me demander si je pouvais l'aider et si j'avais quelques idées à ce sujet, j'ai dit oui j'en ai quelques unes...
J'avais une idée de film de science fiction qui pouvais être réalisé à petit budget, tout en étant grandiose. Le groupe d'investissement à sauté sur l'occasion. Ils voulaient faire un Star Wars, mais voulaient pas dépenser autant pour ça, ils voulaient mettre 400.000$ max.
N'ayant rien à perdre, on a dit banco! On a tourné quelques plan en 16 millimètres et monté une démo. Ils ont aimés. Du coup il nous on donné 20.000$ de plus pour réaliser une bande annonce pour la proposer à un autre groupe d'investisseurs partenaires afin de collecter encore plus d'argent pour le projet. On a réalisé 20 minutes de film avec un tas d'animations, d'effet spéciaux, de matte painting, etc. On apprenait sur le tas en même temps qu'on réalisais tout ça, c'était vraiment le moment clé de transition vers ma carrière de réalisateur. Pour faire tout ça j'ai du quitter mon boulot de routier et m'y consacrer à temps plein.
James Cameron
12 minutes, c'est donc ce qu'il nous reste aujourd'hui de cette fameuse démo crée par James Cameron et Randall Frakes, quelques précieuses minutes totalement volées, une vidéo pirate de piètre qualité apparue il y a quelques années sur internet.
Force et de constater que nous sommes en présence d'une véritable pièce maitresse qui dévoile beaucoup sur l'inspiration de James. Le scénario donne le vertige, promet énormément et défini les fondamentaux qui matérialiseront les contenus des films qui vont lui succéder.
Les fans atteignent le nirvana à chaque occasions de fructueuses collectes d'informations et 2012 marque l'année de tous les délices. En effet, suite à une plainte pour plagiat pour le film Avatar, James renvoi une gifle cinglante en réponse à ses détracteurs, une contre attaque magistrale écrasant tous propos diffamants.
Il y explique minutieusement, dans un dossier de 45 pages, comment Xenogenesis en 1978 posait les bases du film Avatar. Baigné par toute la littérature de fiction, très tôt déjà à l'age de 11 ans James explorai ce genre de concepts dans ses dessins. L'idée de Xenogenesis à ensuite mûri, reprenant également des éléments d'autre projets qu'il a développé en parallèle, dont un certain "Chrysalis", lui aussi script de science fiction inachevé.
Le pitch c'est quoi ?
Xenogenesis évoque la saga des différents voyages du Cosmos Kindred, un imposant vaisseau spatial de presque 2km de long, propulsé par un statoréacteur interstellaire à fusion.
Confronté à la destruction de la terre, dans un ultime effort, les scientifiques lancent une mission de la dernière chance pour sauver l'espèce humaine en tentant de trouver une planète pouvant accueillir la vie. Le Cosmos Kindred transporte une intelligence artificielle cybernétique, gardien d'échantillons de cellules souches humaine, le but étant de cloner des individus aussitôt une planète viable identifiée.
Le thème principal de Xenogenesis se concentre sur l'histoire d'un pilote et d'une clandestine élevé par les cyborgs. Ils vivront des aventures dans des environnement exotiques, dangereux et peuplés d'Aliens. Cameron à crée des mondes divers et variés, remplis de faune et de flore dans lesquels nos deux héros collectent des échantillons.
C'est à partir de ce postulat que se développe toute la généalogie d'Avatar, une grande partie des idées imaginées pour Xenogenesis ont ensuite été reprises pour donner vie aux aventures de Jake Sully.
Premier élément de référence, la planète Pandora est l'une des planète que les héros explorent dans Xenogenesis. Décrit comme lumineuse avec de belles forets et un vaste réseau d'arbres bioluminescent interconnectés, des rivières aux couleurs phosphorescentes, le script nous explique là aussi que l'humanité ne peut pas y survivre car son atmosphère y est irrespirable.
La planète lumineuse est douée de sensation, elle peut ressentir et interagir avec les autres. Elle réagi à l'arrivée des héros, elle cherche à les capturer en les berçant dans un état de béatitude.
Des artworks de James authentifie aussi l'existence de l"Utraya Mokri", l'arbre des âmes, avec ses lianes en fibre optique. Les graines sacrée de Eywa, les Banshee (présenté comme des raies-manta volantes) ainsi qu'une variété importante de la faune et la flore de Pandora sont évoqués dans ce script de 1978.
Coté technologie, là aussi les inspirations sont éloquentes pour la construction d'Avatar.
Dans le court métrage Xenogenesis, la machine mécanisé dirigée par l'héroïne "Laurie" se nomme le "Spider", commandé par un bras "waldos". Elle se bat contre un "Sweeper" filmé en stop motion. Le spider à servi de base au AMP (Amplified Mobility Platform) d'avatar que le colonel Quaritch conduit avec ce fameux bras Waldos. Le Sweeper n'est ni plus ni moins qu'un concept des HK Tanks de Terminator.
Aliens et son combat final avec l'exosquelette étais dans l’imaginaire de Cameron déjà en 1978. Ce combat cyclopéen et ses impératifs techniques sont déjà moteurs de son enthousiasme cinématographique. Xenogenesis expose clairement que James associe déjà très tôt la notion d’intelligence scénaristique à la maîtrise technique.
Les personnages de Xenogenesis visitent également un monde nommé "techno-planète". Ils y découvrent une civilisation avancée qui à péri en ayant fait le choix de se retirer dans des mondes imaginaires très réalistes générés par ordinateurs. Les personnages alien de cette civilisation avancée apparaissent sous forme squelettiques, couchés, mort depuis longtemps au sein de leurs cocon remplis de liquide, le crâne toujours reliés par des câbles à l'ordinateur central.
Les héros de Xenogenesis découvrent que les habitants se sont réunis pour fusionner leurs esprits en une seule super-entité en utilisant les réseaux cybernétiques. Les résultats de cette expérience étant si agréable pour eux qu'ils les considèrent comme de divines perceptions, n'étant plus disposés à y renoncer ils ont choisi de vivre par procuration dans une réalité électronique...quitte à mourir sans se soucier de la procréation, les condamnant à l'extinction de leur race.
L'idée d'une nature consciente, semblable à un seul être sensible est un concept qui me passionne depuis les années 70', j'ai souhaité l'explorer dans Xenogenesis. De même, dans les films Terminator, j'ai conçu l'esprit du monde prenant la forme d'un vaste réseau informatique, Skynet, qui est au courant de tout ce qui se passe sur Terre. Dans Avatar, j'ai nommé le monde esprit "Eywa", la déesse composée de tous les êtres vivants, accessibles à travers l'Arbre des Âmes. J'ai conçu Eywa comme étant « un vaste esprit bio-ordinateur » auquels les Na'vi peuvent physiquement se lier, comme les habitants de l'une des planètes dans Xenogenesis qui ont fusionné leurs esprits individuels en un seul super-entité en utilisant les réseaux cybernétiques avancées.
James Cameron
Assidus de lectures de fiction et par passion pour les sciences, ces emprunts sont totalement assumés par James, l'aidant à développer de larges concepts ambitieux. Notamment des sujets déjà exploités dans des livres tels que "Dans l'Imagicon" (1967) de George Henry Smith (qui a très largement inspiré les frères Wachowski pour Matrix, où le monde réel est en fait un monde généré par des ordinateurs) ainsi que la nouvelle "La Cité et les Astres" (1956) de Arthur C. Clarke.
Xenogenesis explore aussi le concept de "linking" entre humain et machine. Le contrôle du "spider" par exemple se fait via une douille de liaison implanté dans le pilote à travers de laquelle il peut vivre une réalité alternative, via la machine il peut voir, entendre, ressentir, vivre par dimension électronique.
Le terme "link" utilisé pour décrire le processus de projection de l'esprit assisté par les machine de type "psionic" dans Avatar font parti aussi des idées déjà développées par James en 1978.
Mon idée pour Xenogenesis, d'un pod rempli de liquide, se base sur des expériences de privation sensorielle du début des années 1970, avec les fameuse "citernes Samadhi", qui permet au corps de flotter en apesanteur dans un liquide, sans bruit externe ni lumière, tandis que l'utilisateur est en méditation, permettant la création d'un état altéré de conscience. J'ai appliqué ensuite la même idée dans Avatar - Le design des unités de liens psioniques avait pour but de proposer une technologie qui réduit la sensibilisation externe afin que l'opérateur puisse se concentrer sur l'entrée sensorielle venant de l'organisme avatar. L'utilisation d'un tampon de gel de silicone moulée sous l'opérateur a pour but de proposer la suspension fluide d'un Réservoir de flottaison de Samadhi.
James Cameron
Dans Xenogenesis, les individus génétiquement modifiés qui sont "nés" après que le Cosmos Kindred ai atteint la planète hôte pour y développer la nouvelle espèce humaine, ont la peau bleue "oeuf de merle". Le célèbre croquis dessiné par James, qui sert d'introduction au court métrage, illustre une grande femme mince à la peau bleue, qui porte un pantalon moulant violet. Grands et minces, ces personnages serviront de base dans le design de la population autochtones, les Na'vi.
Ce férus de littérature, âgé de 24 ans à l’époque, dessine donc déjà dans Xenogenesis toute la symbolique de l’imagination qui l’a suivi sur ses autres films majeurs. Ce matériel atteste donc de la clairvoyance ainsi que de la richesse artistique de son créateur, fixant ainsi pour toujours le label de "maitre" cinématographique.
Petit budget, moyens limités mais imagination débordante, nous voyons dans ce court métrage toute l’étendue de son savoir faire et l’élaboration d’un monde complexe, d’un design soigné et d’effet spéciaux de très haut niveau compte tenu du faible investissement et de l’année de sa réalisation.
James Cameron dont l’enfance à été imbibée de toute la fibre fantastique dans sa représentation la plus large, mériterai qu’on fasse encore plus la lumière sur Xenogenesis tant il représente concrètement les fondations de sa cinématographie.